Hier, 26 février 2024, le ministre de l’Intérieur a présenté plusieurs mesures en faveur de la normalisation de l’islam en France. Deux semaines après son voyage en Arabie Saoudite au cours duquel il s’est félicité de sa rencontre avec le secrétaire général de la ligue islamique mondiale, quelques jours après avoir fait expulser l’imam Mahjoub Mahjoubi, Gérald Darmanin illustre une fois de plus la méthode du « en même temps » chère à Emmanuel Macron. Le lendemain d’un sondage de l’institut CSA pour le Journal du Dimanche et Cnews, selon lequel 84 % des Français considèrent la France comme une nation de culture et de tradition catholique, le ministre affirme que l’Islam est « une religion française comme les autres« . Pour appuyer ce propos, il avance que 60 % des musulmans en France sont nés en France.
Darmanin veut redorer la réputation de l’Islam chez les Français. Cette religion souffre en effet d’un désamour patent chez la majorité d’entre eux. En 2016, un sondage commandé par le Figaro révélait que l’image de l’Islam se dégradait en France comme en Allemagne. Plus des deux tiers des Français et des Allemands considéraient que les musulmans étaient mal intégrés. En 2019, alors qu’Emmanuel Macron avait déclaré que le port du voile hors des enceintes scolaires n’était pas son problème, un autre sondage pour le JDD indiquait que 61 % des Français jugeaient l’Islam incompatible avec les valeurs de la société française, 80 % considéraient que la question de la laïcité « se pose différemment s’agissant de la religion musulmane ». Darmanin entend répondre à l’inquiétude suscitée par l’islamisation de la France, en luttant contre l’idée que l’islam « est une religion d’étrangers, pour les étrangers, financée par les étrangers.
Darmanin soutien la création de l’ADDAM contre l’Islamophobie
C’est pourquoi le ministre de l’Intérieur a annoncé lundi, dans un discours prononcé au Forum de l’islam de France (FORIF) la création d’un « statut de l’imam en France« . Selon lui, ce statut est attendu par nombre de musulmans et nombre d’imams. Ces derniers, affirme-t-il, sont insuffisamment rémunérés pour leur travail : « Il reste un gros effort à fournir pour que les croyants de France aient des cadres religieux mieux formés, dignement rémunérés et pleinement insérés dans la société française. » Il considère également qu’il faut « renforcer l’offre de formation en France, dans sa dimension théologique et profane, ce qui n’est pas le rôle de l’État« . Les imams seront français, formés en France, mais leur formation ne sera pas prise en charge par l’État. Jusque-là estime le ministre, les imams français « n’ont pas accès à des structures adéquates. »
Cette mesure met fin au régime des imams « détachés », c’est-à-dire envoyés depuis l’étranger. Vraiment ? Darmanin clarifie : « Ça ne veut pas dire qu’il n’y aura plus d’imams étrangers. Il pourra y avoir aussi des imams étrangers, à condition qu’ils soient directement employés comme salarié par un lieu de culte français, et non par une fédération, et à condition qu’ils parlent français, afin qu’ils s’insèrent dans la société française. »
La création de ce statut de l’imam en France (et non « de » France) est assorti de la création, « avec le soutien de l’État » souligne Darmanin, de l’association de défense contre les discriminations et actes antimusulmans (ADDAM). Son président est déjà trouvé. Il s’agira de Bassirou Camara, actuellement représentant des musulmans du Tarn. L’objectif de l’association est d’assurer une “meilleure remontée auprès des autorités” des actes antimusulmans, “manifestement encore sous-estimés”, selon Darmanin. De quoi rouvrir l’épineuse question du concept « d’islamophobie » sur lequel s’écharpent les intellectuels. Deux titres d’essais sur la question peuvent illustrer un différend qui ne faiblit pas, d’un côté le livre d’Abdellali Hajjat, Islamophobie : Comment les élites françaises fabriquent le « problèmes musulman », de l’autre l’essai très remarqué de Philippe d’Iribarne, Islamophobie : intoxication idéologique.
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